45,7x35 in ~ Peinture, Acrylique, Huile, Tempera
" Dr Marteen - Namor " -
1- Ici, Le personnage de Marteen s'est imaginé, sans trop comprendre sa ressemblance à ma marionnette de ventriloque, en queue de pie et haute forme des années fin 70 début 80 que je ramenais de New York étant enfant.
Il était dans ma chambre parisienne à bonne hauteur, posé à me regarder depuis la diagonale de la pièce, à mon lit, coin droit.
Il tenait près de lui mon Borsalino marron, sur le meuble vitrine où j'entreposais toute ma collection de robots japonais et américains, de mannequins... et de bien d'autres jouets de sciences fiction et appareils de jeux électroniques.
Celle-ci, cette vitrine sous laquelle j'étais observé, était donc à gauche dans le coin, de la grande fenêtre.
Au milieu, devant la fenêtre toujours entrouverte et voilée de transparence, derrière les rideaux blancs et opaques jamais complètement fermés, un courant d'air faisait vivre un mouvement de vie subtil et invisible, comme un fantôme livré dans sa gaze qui venait se frotter à mon bureau minimaliste et blanc.
Le bureau n'avait aucun angle droit juste des arrondis d'armature métal cylindré de bon diamètre, peinte en vert... Ma chambre était tout en blanc et le soir venu dans la pénombre éclairée, sous la lumière du bureau qui donnait une ambiance folle, trônaient ma machine à écrire et ma planche à dessin.
Mon 'feutre' que je ne tarissais décidément pas de porter sans plus savoir que je l'exhibais à l'époque - J'étais toujours habillé avec style, j'aimais çà - était un souvenir de mon beau-frère, procureur mais qui en avait usé du papier comme un reporter sous la pluie de Manhattan, dans son imper beige froissé et sous notre ami le chapeau. Il portait des bretelles. ...D'ailleurs Marteen avait été également l'un de ses cadeaux pour moi, mais de Noël cette année-là.
Plus Marteen apparaissait, plus je le conjuguais à " Namor the Submariner," super-héros des Marvel comics que j'assimilais à un grand pouvoir, beaucoup de colère et à un formidable orgueil.
Finalement un entre deux dans ce visage se prononçait.
Jusqu'à l'apparition du flux d'énergie circulant si librement entre eux.
_Drôle pour une marionnette dont le personnage n'est que la projection animée de son maître, invisible, et dont il se défend d'être le prolongement et dont lui se défend d'être l'auteur.
_Drôle pour un prince iconoclaste dont la douceur ferait mentir le chef de guerre qu'il est en vérité et qui vit sa vie comme un être désabusé ...en dehors du monde, attendant quelques dehors civils retrouvés, pour y apparaître enfin flamboyant.
Par ces personnalités multiples, transgressives qui finalement exprimeraient tout ce que Marteen est en masque transparent : civile, urbain, avec une histoire des âges et une vision forte, une lumière dans l'âme.
Et une marionnette par état de fait, manipulée, par son destin, par son caractère, tâchant de recouvrer une part de liberté jusqu'à fendre l'atome, devenant un prince, un valeureux. Ou le bras qui manipule dans l'ombre ou à côté de peur d'être vrai, de peur s'offrir au monde et de sauter dans le vide.
Lequel des trois n'est pas libre ? La marionnette, le bras, le super héros. Peut-être personne.
"Namor" est un être assez dure, assez misanthrope pour un super héros. Sa ressemblance moins les oreilles en pointes, lui conférait un esprit plus apaisé, plus tendre.
2- Dr Marteen, une fois éclairée de ces deux entités ...insufflait la figure résiliante de cet homme, à la vie surprenante, suintante d'épreuves surmontées.
_Une vie passée à aider les âmes brisées.
_Une vie dédiée qui ne pouvait trouver autre salut que dans le soin ...que dans le service aux autres.
_Un truc ... palliatif pour lui, histoire de combler le vide. Ce manque de ceux qu'il a pu aimé un jour à jamais.
_Un vide, dénudé de ceux qu'il aime encore à vif et qu'il ne peut oublier.
Aider les uns dans leur quotidien, les autres dans leurs fragilités.
Accompagnant ces petites gens nullement cachées dans leur dimension, à tout faire véritablement :
De la lecture à l'écriture des lettres, par exemple. Du règlement des factures, aux contestations aussi, souvent. De l'apprentissage même d'un téléphone, devenu si ce n'est une barrière, une source de déclassement dans cette défaite de la compréhension pour eux - ce qu'ils ressentent pour certains de ces âgés-là ...et je ne parle pas de l'ordinateur.
Il en a vu un pleurer, parce que c'était "bien trop compliqué", pour eux.
Il les a vu "se sentir plus rien" comme ils disent ...devenus "moins que rien" ...regrettant le temps qui avait passé et de voir aujourd'hui, leur misère, littéralement ...à ne plus pouvoir concevoir même l'idée de s'approprier la connexion à un truc bête.
Relier des trucs entre eux ...l'accession à l'intelligence, la possibilité du lendemain.
Il en a passé du temps à rassurer, à expliquer, à redonnner de l'espoir, à démonter les tristesses et cette incapacités à faire ...à entreprendre, quoi.
Quand il fallait "défaire" cette peur paralysante qui n'avait que si peu de sens ou de raison d'être, il savait s'impliquer comme personne.
Il fallait ré-enclencher les réflexes d'apprentissages - çà les rendaient alors heureux. Soulagés un peu, derrière ces pleurs si sourds et bien que dégagés de tout orgueil - c'était là le plus dur. Les larmes tentaient de se frayer un chemin par les rides d'un visage aux creux des grands parcours et submergeaient les sillons plus fins des grandes espérances. Ils avaient été bons, elles avaient été belles leurs vies.
Bref ...Il avait tâché éperdument de tout résoudre pour eux.
Le suivi médical aussi - ...Il dispensait des soins aux plus défavorisés, aux plus démunis.
Cela avait infiniment plus de sens pour lui dans cette autre partie de vie que de préférer sauver, des gens qui n'avaient plus rien que leur seule vie à sauver ...par leur santé.
Et peut-être encore, leur redonner l'envie d'un sursaut ...de "rebondir" - Ce terme était idiot m'aurait-il avouer à ce propos - même s'ils manquaient effectivement, de beaucoup de soins ...dentaires principalement et auditifs aussi, singulièrement.
3 - Après les théâtres de guerres, les contrées obscures des famines et de tant de ces victimes collatérales - ...Guerres sanglantes où la population est sacrifiée, celles où il avait opérer, sauvé au propre comme au figuré - ...Il s'était abandonné entièrement à se devoir de récupérer ces âmes sensibles qui d'une crise de vie à une autre s'étaient laissée déborder, s'étaient laissée glisser ...se laissaient mourir doucement.
Des populations de femmes et d'hommes, parfois même d'enfants ...abusés, maltraités, violentés ...des êtres qui après de longues années, ne savaient plus comment faire, ni comment s'adresser, ou se tenir, ou parler ou écouter, encore moins espérer. ...Jusqu'à même nager.
Rattraper et remonter sur ce 'navire' tellement loin d'eux dorénavant, ils s'étaient 'rendus'. Ceux-là n'étaient pas sur le radeau de la Méduse, ils en avaient été exclus.
Oeuvrant ainsi, près des gens dans les arrières cours des quartiers, sous les ponts ou aux abords des périphériques, dans les coins proscris, déménagés de l'exercice des politiques sociales à l'échec répétitif, dans les campagnes profondes, dans les bois ...il en reste loin des autres, des laissés pour contre. Une médecine de proximité, une médecine associative, caritative presque.
Une vie de petites mains donc le jour, de soignant la nuit, mais toujours au chevet de malades et de tous ceux qu'il aura pu trouver à aider. Ces grands-mères, ces délaissés, ces seniors qui vivent trop seuls, apeurés depuis longtemps pour certains, vivant de peu, attendant la nuit, le gouffre de leur vie saignant du coeur au regard de celle-ci.
La vie des gens seuls et trop vieux qui n'ont plus personnes à aimer, à aider, ni à qui sourire, ni à qui parler.
Toutes ces histoires de vie.
Pour ce marin-là, bellilois de naissance.
Et qui par une vie de bourlingueur en tant que chirurgien, aura été sur tous les fronts. Opérant de guerre en guerre, se confinant à de la médecine d'urgence le plus souvent et innovant ou accompagnant une médecine chirurgicale, à toutes les autres dans tous les coins du monde les plus reculés.
Il aura donné sa vie à sa vocation.
Au soin ...aux souffrants, aux Autres ...quand il sacrifiait la sienne en vérité, à son foyer ...à sa femme ...et à ses enfants. Qui n'auront pas suivis ou compris ou trop bien justement. Parce qu'il était inadapté lui-même à cette schizophrénie.
Et même si souvent, ils auront sentis donc et soutenus ...ils l'auront vu un jour partir, s'en aller de nouveau et puis ...ne plus revenir.
Ils auront fait leur vie ainsi de côté et sans lui.
Les choix d'une vie...
GrégoryDreyfus©2013
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